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21 janvier 2009 3 21 /01 /janvier /2009 10:22
PREPARATIONS POUR NOURRISSONS ET PREPARATIONS DE SUITE A BASE DE PROTEINES DE SOJA : données actuelles
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D. RIEU - Janvier 2001
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Des préparations à base de soja ont été proposées dès 1929 pour aux U.S.A. comme substituts du lait chez des nourrissons atteints d'intolérance au lait de vache [1]. Depuis les années 60 les modes de préparations et les compositions des préparations à base de protéines de soja destinées aux nourrissons (PNPS) ont beaucoup évolué ; les préparations commerciales actuellement disponibles en France répondent aux critères définis par les directives de la Commission Européenne de 1991 et 1996 (91/321/CEE - 96/4/CEE) [2,3].

De façon paradoxale, alors qu'on dispose aujourd'hui de nombreux aliments diététiques sans lactose et/ou sans protéines du lait de vache, on constate dans certains pays une nette augmentation de la consommation des PNPS. Aux U.S.A. la consommation aurait doublé au cours des dix dernières années et atteindrait environ 25 % de la consommation des préparations à base de lait de vache [4] ; en Italie en 1977 elle était de 5,6 % de la consommation des laits infantiles [5] ; en France la consommation est moindre mais en nette augmentation : 0,49 % en 1996, environ 1,67 % en 2000 [6].

Il nous a donc paru souhaitable de préciser aujourd'hui la composition, l'utilisation, la place comme substitut des préparations lactées, des préparations pour nourrisson à base de protéines de soja (PNPS). Par ailleurs, nous aborderons un problème d'actualité, celui des phyto-oestrogè nes apportés par ces préparations.

PROPRIÉTÉS NUTRITIONNELLES DU SOJA

Le soja est une graine oléo-protéagineuse composée de 40 % de protides, 35 % de glucides, 20 % de lipides, 5 % de minéraux en pourcentage de matière sèche. Les glucides sont constitués pour 85 % par des fibres alimentaires, 15 % par des glucides à faible poids moléculaire parmi lesquels le raffinose et le stachiose qui, dégradés par la flore colique peuvent être la source de flatulence [7]. Les lipides sont riches en acides gras poly-insaturés : 62 % dont 53,5 % d'acide linoléique et 8,5 % d'acide linolénique ; les acides gras mono-insaturé s représentent 24 % et les acides gras saturés 14 %. La graine de soja est riche en phospholipides d'où sont issues les lécithines très utilisées comme émulsifiants dans l'industrie alimentaire mais aussi comme source d'acides gras insaturés et de choline [8].

Comparée à l'oeuf, protéine de référence, la composition d'acides aminés essentiels des protéines de soja est satisfaisante sauf pour les acides aminés souffrés (méthionine et cystine) qui sont limitants. L'indice chimique des protéines de soja est de 47. Sa teneur en lysine est élevée, comme toutes les légumineuses le soja est donc complémentaire des céréales riches en acides aminés souffrés et pauvre en lysine [9]. Depuis les travaux de Fomon et al., les préparations pour nourrissons à base de protéines de soja sont enrichies en méthionine [10]. Par ailleurs, la graine de soja contient plusieurs facteurs antinutrionnels ; les inhibiteurs de protéase digestive trypsine et chymotrypsine, les phytohémaglutinines sont détruites par la chaleur. La richesse du soja en phytates (myo-inositol hexa-phosphate) diminue la biodisponibilité du calcium, du zinc, du fer, du cuivre et du manganèse. Les techniques industrielles actuellement utilisées ne permettent pas d'éliminer complètement les phytates [11]. Les principaux produits dérivés de la graine de soja sont l'huile, la farine délipidée à partir de laquelle on obtient des concentrés ou des isolats de protéines, des jus ou laits source de nombreux aliments (yaourts, caillés...).

Depuis le milieu des années 60 les préparations pour nourrissons sont réalisées à partir d'isolats de protéines de soja.

COMPOSITION DES PRÉPARATIONS POUR NOURRISSONS ET DES PRÉPARATIONS DE  SUITE A BASE DE PROTÉINES DE SOJA

La composition des préparations pour nourrissons et des préparations de suite à base de protéines de soja a fait l'objet des recommandations du Comité de Nutrition de l'ESPGAN en 1990 [12]. Elles doivent répondre aux critères de composition définis par les directives de la commission des Communautés Européennes de 1991 (91/321CE) et 1996 (96/4/CE) [2, 3]. Les préparations commerciales disponibles en France apportent 67 à 72 Kcal /100 ml ; elles sont sans lactose, sans saccharose, sans gluten, sans protéines du lait de vache ; la plupart d'entre elles sont enrichies en  méthionine, en carnitine et en taurine ; Les lipides sont d'origine végétale apportant acides linoléique et linolénique ; elles contiennent des sels minéraux et des vitamines. Compte tenu de leur teneur en phytates, les directives de la Communauté Européenne recommandent que leurs compositions en fer et en zinc soit supérieures à celles des préparations lactées du nourrisson alors que les recommandations pour les compositions en calcium ou en phosphore ne sont pas différentes. Chez les enfants nés à terme, au cours de la première
année il n'a pas été constaté de différence dans la minéralisation osseuse entre les sujets qui recevaient des préparations à base de protéines du lait de vache ou de protéines de soja [13, 14]. Différentes techniques permettent de diminuer la teneur en phytate des préparations à base de protéines de soja.
Chez l'animal recevant des préparations pauvres en phytates, une meilleure absorption du zinc a été observée [15]. Chez 10 nourrissons recevant une préparation à base de protéines de soja pauvre en phytates, Van Dael et al ont obtenu, en utilisant les isotopes stables, une meilleure absorption du manganèse mais pas d'effet significatif sur l'absorption du calcium, du fer, du zinc et du cuivre [16]. Les phytates ou d'autres substances peuvent aussi interférer avec le métabolisme de l'iode. Avec les anciennes préparations à base de farine de soja des goîtres par déficit en iode, ont été rapportés chez des nourrissons [17, 18]. Depuis la supplémentation en iode des préparations vers 1960, il n'a plus été décrit d'hypothyroïdie par déficit iodé mais chez des nourrissons hypothyroïdiens alimentés avec des PNPS la persistance d'une insuffisance thyroïdienne malgré des doses élevées de L tyroxine a été rapportée [19, 20]. En 1996, le Comité de Nutrition de la Société Américaine de Pédiatrie a demandé que la concentration en aluminium des préparations pour nourrissons soit diminuée compte tenu de sa toxicité
potentielle ; il a souligné que les PNPS en apportent des quantités importantes allant de 500 à 2400 mg/l contre 15 à 400 mg dans les préparations lactées et 4 à 65 mg dans le lait de femme [4].

UTILISATION DES PRÉPARATIONS POUR NOURRISSONS ET DES PRÉPARATIONS DE  SUITE A BASE DE PROTEINES DE SOJA

L'utilisation des PNPS a commencé aux U.S.A. au début des années 1900 chez des nourrissons intolérants au lait de vache. Par la suite elles ont été utilisées comme aliment sans lactose en particulier au décours des diarrhées aiguës et dans l'intolérance aux protéines du lait de vache.

Intolérance au lactose et au galactose

Au début des années 1970 on pensait que l'intolérance au lactose était fréquente au cours des gastro-entérites aiguës ; Les PNPS ont été très utilisées comme aliment diététique sans lactose dans certains pays.
Aujourd'hui l'intolérance secondaire au lactose au cours des diarrhées aiguës paraît moins fréquente ; l'utilisation des préparations sans lactose n'est indiquée qu'en cas d'aggravation de la diarrhée à la reprise du lait ou pour certains auteurs chez les nourrissons de moins de trois mois [21].
De la même façon les PNPS sont utilisables au cours des exceptionnelles
diarrhées à début néonatal par intolérance congénitale au lactose. Leur place dans le traitement de la galactosémie congénitale par déficit en galactose 1-phosphate- uridyl-transfé rase est discutée du fait de leur teneur en raffinose et stachyose, substances qui peuvent libérer du 1,4 galactose dans le tube digestif sous l'action des galactosidases bactériennes [22, 23,
24]. Actuellement en France les PNPS ne sont pas conseillées dans le traitement de la galactosémie congénitale.

Allergie aux protéines du lait de vache

Jusqu'en 1946, date de l'apparition des hydrolysats de protéine, les PNPS étaient les seuls aliments diététiques utilisables chez les nourrissons intolérants ou allergiques aux protéines du lait de vache. Il est apparu par la suite qu'un certain nombre de nourrissons allergiques aux protéines du lait de vache présentaient aussi une allergie aux protéines de soja. [25, 26, 27]. Depuis, les principaux allergènes des protéines de soja ont été précisés, il s'agit de la glycinine (poids moléculaire : 320 000) et la -conglycine (poids moléculaire : 180 000) [28]. Les manifestations cliniques de l'allergie aux protéines de soja peuvent être aiguës à type d'éruption, d'oedèmes, de vomissements, de diarrhée, de choc ou chroniques à type d'entérocolite ou d'entéropathie avec malabsorption et atrophie villositaire de degré variable [29, 30]. Elles régressent sous régime d'exclusion et sont habituellement transitoires. La fréquence de l'allergie aux protéines de soja chez les nourrissons allergiques aux protéines du lait de vache varie dans la littérature de 15 à 60 %, la plus grande fréquence s'observant dans les syndromes d'entérocolite ou d'entéropathie chroniques dont le mécanisme immunologique n'est pas lié au IgE [28, 31]. En 1983, le Comité de Nutrition de l'Académie Américaine de Pédiatrie a recommandé de ne pas utiliser les PNPS chez les nourrissons ayant une allergie prouvée aux protéines du lait de vache [32]. En 1990, le Comité de Nutrition de l'ESPGAN s'est exprimé dans le même sens [12]. En France ces recommandations ont été largement suivies, à l'inverse, en Italie en 1990 une enquête multicentrique portant sur 2 108 nourrissons allergiques aux protéines du lait de vache a montré que 50 % d'entre-eux avaient reçu des PNPS mais que celles-ci avaient été un échec dans 47 % des cas [5]. Cependant l'exclusion des protéines de soja est actuellement discutée chez les nourrissons ayant une allergie aux protéines du lait de vache à médiation IgE. Ainsi chez 93 enfants âgés de 3 à 41 mois allergiques aux protéines du lait de vache à médiation IgE,
Ziegler et al ne retrouvent que 14 % d'allergie aux protéines de soja, le diagnostic étant basé sur les prick-tests, des tests de provocation orale en double aveugle et la tolérance clinique pendant un an. Pour ces auteurs, de nombreux enfants ayant une allergie aux protéines du lait de vache à médiation IgE pourraient recevoir des PNPS après étude de leur tolérance [33]. Dans ses recommandations en 1998, le Comité de Nutrition de l'Académie Américaine de Pédiatrie distingue les deux situations : contre-indication des PNPS dans les entéropathies et entérocolites, possibilité d'utilisation en cas d'allergie aux protéines du lait de vache à médiation IgE [4].

Prévention des maladies allergiques

L'intérêt des PNPS dans la prévention des maladies allergiques, que se soit chez l'enfant normal ou chez l'enfant à risque allergique en raison d'antécédents d'atopie chez les parents du premier degré, a fait l'objet depuis 40 ans de nombreuses publications contradictoires [31, 34, 35].
Actuellement cette indication n'est plus retenue. C'est l'allaitement
maternel qui est recommandé ou à défaut une formule contenant des protéines partiellement hydrolysées [28, 36]. Chandra a étudié l'incidence des manifestations allergiques pendant 5 ans chez 216 nourrissons à risque allergique nourris jusqu'à 6 mois selon 3 modalités différentes :
préparation à base de protéines du lait de vache, préparation à base de protéines de soja ou préparation contenant des protéines partiellement hydrolysées. Il n'a pas été constaté de différence sur l'incidence des manifestations allergiques (eczéma, asthme, allergie alimentaire) entre les enfants ayant reçu du lait de vache ou des PNPS, l'incidence était par contre plus faible chez les enfants ayant reçu une préparation hypo-allergénique[ 37].

Autres utilisations

Les PNPS ont été largement utilisées aux U.S.A. et au Canada dans les troubles fonctionnels du jeune nourrisson à type de régurgitations, d'agitation, de coliques sans démonstration évidente de leur efficacité [38]. Dans le syndrome de coliques du jeune nourrisson où une allergie aux protéines du lait de vache est en cause dans certains cas, des résultats variables ont été rapportés [39]. Chez 50 nourrissons atteints de forme sévère de coliques du nourrisson Lacono et al ont observé une amélioration rapide de la symptomatologie dans 70 % des cas, mais par la suite 16 % d'entre-eux ont présenté une allergie aux protéines de soja [40]. Ainsi lorsque l'on suspecte une allergie aux protéines du lait de vache, il paraît préférable d'utiliser un hydrolysat de protéines [41].

Certaines familles "végétaliennes" désirent, si l'alimentation au sein n'est pas possible, alimenter leur enfant avec des PNPS. Chez les nourrissons seules les préparations entrant dans le cadre de la règlementation des aliments de l'enfance ont une composition adaptée et peuvent être utilisées.
Avec ces préparations enrichies en particulier en méthionine, plusieurs études ont fait état d'une croissance normale. Fomon et Ziegler, chez des nourrissons nourris exclusivement avec des PNPS entre 8 et 112 jours, ont observé des gains de poids et une croissance semblable à celle de nourrissons du même âge nourris avec des préparations à base de lait de vache [38]. D'autres publications font état de minéralisation osseuse comparable chez les nourrissons recevant du lait de mère, du lait de vache ou des PNPS [13, 14]. Cependant une moins bonne croissance et une diminution de la minéralisation osseuse ont été rapportées chez des nouveau-nés prématurés [42].

Articles connexes :
- 20 janvier 2009 : Lui donner du lait de soja? ou pas? partie 1/3

- 22 janvier 2009 : Lui donner du lait de sojat? ou pas? - partie 3/3
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